Sunday, August 22, 2010

L’école qui nous fait dignes ou soumis

Histoire

Cette semaine, j’ai enfin pris mon courage entre mes deux mains, et décidé de parcourir le chemin fastidieux de renouvellement de ma carte nationale biométrique. Ce fut une aventure tellement … unique... que je voulais vous la raconter.

5 heures du matin, je saute dans la voiture et cours vers le commissariat affecté à l’arrondissement où j’habite, laissant derrière moi la petite qui dort en priant qu’elle ne se réveillera pas avant mon retour. A mon arrivée, deux silhouettes se découpent dans la nuit encore tombante devant la porte du bâtiment. Salamalecs échangés, et je demande à inscrire mon nom sur la « liste ». Je suis 13 ème dessus, ouf ! On m’explique d’emblée que la liste est « gardée » par la dernière personne qui y inscrit son nom. Ingénieux ! Je serais donc la gardienne et protectrice de la liste avant de la confier au prochain venu. Je rêve ! Y a-t-il sur terre un gouvernement respectable qui fait venir ses citoyens à une heure aussi incroyable pour un papier administratif bidon ?! Je refoule en mon intérieur la rage de toutes ces pensées qui me démangent d’ores et déjà. Au même moment, une autre femme apparaît accompagnée de son père âgé, puis une troisième. On voulait un homme pour assumer la garde… tout compte fait, deux femmes ont accepté de prendre la relève ; la nouvelle arrivée, et une autre qui était là depuis 4h du matin. Elles m’ont gentiment pressée de retourner voir ma fille. Rendez-vous à 7h30 pour assister à « l’appel ».


7h40, je rejoins mes nouvelles « amies » dans une file d’attente qui s’était formée de l’autre côté du boulevard – pour une raison ou une autre, il nous était interdit d’utiliser la salle d’attente du commissariat, drôle comme décision ! Aussitôt, je demande après la liste. On me murmure qu’elle est bien cachée, et que le nombre d’inscrits a atteint 50 personnes, juste le nombre que le commissariat accepte quotidiennement. Pour trois quartiers en entier, 50 était un nombre qui n’équivalait en ridicule que les personnes qui ont pu l’inventer. Mais bon! Me dis-je. Je prends place par terre, et attends avec les autres.

Vers 8h, des nouveaux arrivés apparaissent demandant à s’inscrire sur la liste, et le jeu commence ! Tout le monde se met à nier avoir connaissance de qui avait la liste. Je savais pertinemment que l’une des femmes qui avaient assumé la garde l’avait. Mais nous savions aussi que deux jours plus tôt, un incident s’était produit où la liste avait été déchirée par des citoyens mécontents. Prenant peur que le même scenario se reproduise, nous gardons silence, certaines que de toute façon le commissariat ne prendra pas plus de 50, et essayant d’en convaincre ces nouveaux arrivés.

9h, on nous fit rentrer, enfin, au commissariat. Un agent fait l’appel des personnes inscrites sur la liste d’un ton où l’arrogance prend le dessus sur la politesse…la remise des dossiers démarre, tant bien que mal… Sans surprise, des aberrations prennent place comme cette demoiselle, non inscrite sur la liste, qui se voit servie bien avant nous autres... Ma colère finit par être asphyxiée par le mutisme de la présence, et je demande seulement à quitter l’endroit.

Rétro

Dans tout cela, ce qui m’a rongée n’est pas le fait que je me sois déplacée très tôt dans la matinée pour une course, mais la réalité amère qu’en tant que citoyens, nous avons été tellement aliénés qu’aujourd’hui nous acceptons tout bonnement ce genre de situations.

Nous acceptons de ne pas lever nos voix contre la démission de l’Etat de l’une de ses fonctions principales. Nous acceptons de ne pas condamner la corruption…

En France, on apprend aux enfants que le citoyen se révolte pour ses droits, et en conséquence les français ont la drôle de réputation d’être un peuple toujours prêt à faire des grèves. Aux Etats-Unis, l’élève apprend à challenger l’instituteur par ses idées et ses points de vue sans que cela ne lui coûte des notes en moins…

Dans nos écoles, on nous apprend à avaler tout ce que dit le maître/la maîtresse, de ne rien remettre en question au risque d’être « mal élevé » et donc puni. On finit ainsi par enterrer, doucement et lentement, la seule flamme qui permette encore à l’homme d’évoluer : l’esprit critique… tout cela, pour que nous soyons exactement ce que nous sommes aujourd’hui. Est-ce une pure coïncidence ? Si çà ne l’est pas, alors c’est sacrément bien réfléchi !

2 comments:

Mounir said...

Bien dit !!!

Amine Bouyarmane said...

Je suis tout à fait d'accord avec vous. En général, on nous impose de se soumettre à tout dès notre plus jeune âge. En effet, les parents éduquent leurs enfants par les menaces, par la peur. A l'école, de même, on ne peut pas remettre en question ce que dit le professeur au risque qu'il mette le "perturbateur" dans sa liste noir. En dehors de la rue et de l'école, on ne peut remettre en question les dirigeants, car au Maroc, les gens au pouvoirs se pensent au dessus des lois. Au niveau religieux au ça rend les choses compliqué, on ne peut en aucun cas émettre un point de vue, aussi constructif soit-il, sans être mis dans la case de "tfelsif khawi" ou d'agnosticisme carrément.

Comment voulez-vous que ce peuple soit à la fin, un peuple soumis tout simplement.

http://www.facebook.com/Maroc.JeLaimeDoncJeLeCritique