Tuesday, March 22, 2011

Maintenant je veux bosser, la fac çà sera pour après !

La question cruciale semble pendue à toutes les lèvres des jeunes élèves à la porte du lycée: Que fais-je après le bac ? Avec ce que j’appelle la « crise d’orientation » au Maroc, le jeune lycéen et la jeune lycéenne ont peu de chance d’atterrir sur les bons rails en suivant leur propre instinct.

Je ne souhaite pas détailler cette histoire d’orientation car je souhaiterais y revenir dans un autre post vu son importance. Par contre, parlons un peu d’une option très rarement abordée à l’école, et encore plus rarement acceptée par les parents ; on va l’appeler « le break scolaire ».

J’entends par le break scolaire une rupture que l’élève fait avec les études à sa sortie du lycée. A 18 ans, le jeune élève peut choisir de faire halte aux études pour intégrer le marché de l’emploi « momentanément » avant de reprendre les études quelques années plus tard. Au premier abord, cette idée ne traverse l’esprit du parent marocain lambda sans y laisser la trace d’incrédulité qui va jusqu’au refus littéral. Mais il semblerait que les spécialistes auraient un point de vue différent. Voyons…

Pourquoi le Break Scolaire est important :

Selon le Professeur et psychanalyste Pr. Mamoun Moubarak Dribi, il serait important voire utile qu’un élève fasse un arrêt de ses études juste après le bac s’il le souhaite fortement. Il justifie ce point de vue par les arguments suivants :

1- L’élève pourrait être extenué physiquement et psychiquement à la sortie du Bac. L’arrêt momentané lui permettrait de reprendre des forces tout en testant ses aptitudes professionnelles « ce qu’il/elle vaut sur le marché »

2- L’adolescent a aujourd’hui accès à plusieurs éléments renforçant son indépendance relative dès son jeune âge (téléphone portable, argent de poche, moto, iPhone, …). Voulant affirmer cette indépendance, ne serait-ce que pour une période déterminée, l’adolescent/adulte opte pour une année ou deux d’activité professionnelle avant de poursuivre des études supérieures.

3- Enfin, ce break s’avéreraient être une phase importante dans la mesure où elle permettrait à l’élève/étudiant de mieux calibrer sa vocation et de mieux orienter ses choix de carrière, et donc d’études supérieures.

Cela dit, Pr. Dribi insiste fortement sur le fait de Retourner (avec un grand « R ») aux études supérieures dès que possible.

Maintenant, jusqu'à quel point le Break Scolaire est applicable au Maroc ?

Oui, en effet, ce serait idéal si l’élève choisit d’intégrer le marché du travail pendant quelques années, et puis un beau jour décide de devenir médecin, envoie sa candidature à la faculté de

médecine de sa ville et obtient une place sur ses bancs. L’entrave majeure pourtant, à ma connaissance, serait la validité du Bac, une notion que mes capacités intellectuelles n’arrivent pas encore à absorber, comme si deux ans après le bac, les facultés mentales de l’élèves deviennent rouillées, son savoir obsolète, et sa capacité à réussir remise en question. Dans les pays aujourd’hui leaders en éducation supérieure, une telle entrave n’existe pas. Après le lycée, l’étudiant est libre de construire son chemin à l’intérieur ou à l’extérieur des murs de l’université. Si à 40 ans, il / elle décide de reprendre les études, personne n’ira lui demander de refaire son Bac ! Au contraire, on tiendrait plutôt compte de ses compétences, son adaptabilité, sa capacité d’apprendre rapidement, …etc. Le résultat en est des personnes qui finissent forcément par atterrir dans leur domaine préféré, et donc un domaine où ils/elles s’épanouiraient et seraient hautement productifs.

Maintenant, il faut dire aussi que le regard de la société envers ces choix atypiques est encore pesant. Mais la société change et les mentalités changent aussi par la force des choses.

Conclusion :

Le chemin de la réussite ne passe pas forcément par la voix typique et ordinaire que « Madame/Monsieur tout le monde » se sont tracée à la naissance. L’expérience a prouvé que prendre des décisions courageuses et atypiques dans la vie peuvent avoir un retour très bénéfique sur l’individu et sur la société pourvu que cet individu soit en mesure de défendre ses choix. La société, quant à elle, finit par accepter voire valoriser les expériences « uniques ».

Friday, March 18, 2011

Al-Jisr : le Pont entre l’Entreprise et l’Ecole



« Tous les acteurs socio-économiques conviennent de l’urgence d’améliorer les performances de notre système éducatif afin de faire face aux défis du 21ème siècle. Plusieurs démarches ont été entreprises dans ce sens notamment en identifiant les faiblesses et en essayant d’y apporter les solutions. Cependant l’ampleur de cette problématique interpelle l’entreprise, principal débouché de notre système éducatif, afin qu’elle s’implique dans son amélioration. »

C’est par ces mots que Mr. M’hammed Abbad Andaloussi entame l’éditorial d’Al-Jisr, Association dont il est Président. Comme son nom l’indique, Al Jisr (ou Le Pont) a pour mission de mobiliser les entreprises en vue de leur implication dans l’amélioration des performances de l’école publique. En treize ans d’existence, l’association a réussi à drainer les efforts de plus d’une soixantaine d’entreprises marocaines pour parrainer 70 écoles appartenant à différentes régions du Royaume. L’entreprise parrain vient en aide à l’école parrainée par des dons en nature comme des ordinateurs, du matériel éducatif, l’aménagement d’espace et de terrains de sports…. mais aussi par d’autres formes de soutien qui s’étalent sur le long terme. A ce titre, certaines entreprises enverraient chaque matin du personnel de ménage pour s’occuper de la propreté des classes avant le début des cours à 8 heures dans les écoles parrainées. D’autres entreprises enverraient des infirmiers pour assurer des contrôles et des soins dans le but de réduire les entraves à la scolarité. Et enfin, certaines entreprises interviendraient par l’implication directe de leurs cadres et employés dans l’apport d’une plus-value à l’école à travers des présentations interactives, des compétitions et activités d’initiation à la création d’entreprise.


En général, comme le souligne Mr. Andaloussi, l’appui de l’entreprise est multiforme, et vise à :




  1. contribuer à l’amélioration des conditions et des méthodes d’apprentissage
  2. développer des activités parascolaires (peinture, poésie, clubs, …etc.)
  3. mobiliser la communauté de l’école
  4. développer une culture d’évaluation des performances de l’école

Je vous laisse découvrir une vidéo résumant tout cela et plus encore http://www.aljisr.ma , en espérant que cela soit une source d’inspiration aux managers, employés et chefs d’entreprises pour contribuer à la construction de l’Economie du Savoir dont notre pays a tant besoin.

Tuesday, March 1, 2011

Serait-ce Sciences Po du Maroc ?


Une nouvelle école à Rabat, un nouveau profil de diplômés. L’EGE, ou l’Ecole de Gouvernance et d’Economie est la première école du Royaume spécialisée dans les sciences politiques et économiques. J’y ai rendu visite hier soir pour assister à une conférence sur la Diplomatie de Connivence Internationale tenue par Mr. Bertrand Badie, Directeur à Sciences Po du programme doctoral en sciences politiques des relations internationales.

Trois aspects ont particulièrement attiré mon attention :

1- Le cadre : Correct et très convivial, l’école est aménagée de sorte à offrir un environnement agréable où il fait bon étudier.

2- Les étudiants : J’ai apprécié le fait que les étudiants sont arrivés nombreux pour assister à la conférence, mais surtout, à l’heure ! J’insiste sur l’heure car le temps aurait une définition différente au Maroc de ce qui est communément admis à l’échelle internationale. J’ai aussi apprécié la qualité des questions posées par les étudiants qui étaient à la hauteur de l’audience et de l’intervenant.

3- Le staff : Dans le couloir principal de l’école, des jeunes hommes et femmes s’affairaient à accueillir les participants et mettre tout en place avant le démarrage de la conférence. J’ai appris par la suite que la majorité du staff de l’école sont de jeunes cadres seniors. C’est dire le souffle jeune que souhaiterait insuffler le Directoire de la Fondation à cette école qui porte tant de promesses…


Enfin, un petit mot sur la conférence en soi. Entremêlant concepts théoriques et histoire du système de gouvernance internationale, le conférencier a brillamment défendu sa thèse de diplomatie de connivence, qu’il a appelée aussi « Diplomatie de Clubs ». Très brièvement, Mr. Badie critique fortement le système de gouvernance oligarchique en décrivant sa dérive du G5 au G8 puis au G20. Si ce système d’oligarchie autoproclamée contient aujourd’hui et les « Aristocrates » (les pays du G5) et les « Nouveaux Riches » (les pays qui ont ensuite rejoint pour constituer le G20), il exclue inéquitablement les 172 pays du monde dont le PIB total ne dépasse pas les 20%. Or cette règle des 20/80 néglige fatalement la constatation que l’instabilité politique et économique provient aujourd’hui principalement de ces mêmes pays exclus, les pays faibles. Mr. Badie conclue sa conférence par trois points principaux :

1- La diplomatie de connivence reste informelle (discussions au coin du feu et clubbing) et donc échoue à créer une réelle réforme du système politique international

2- La connivence est une machine à exclure (20 états membres et 172 autres exclus)

3- La connivence est une machine à entretenir l’élargissement du fossé entre les attentes du système de gouvernance internationale et la réalité de ce système.

De telles conférences, on m’a dit, sont organisées de manière très régulière (2 à 3 par semaine). Pour une telle qualité, je ferais bien le déplacement et vous encouragerais à en faire autant…Le pire qui puisse arriver est que vous appreniez de nouvelles choses ! :-)