En grande majorité, nous avons tous, un jour, durant notre scolarité, aidé ou demandé l’aide d’un camarade pour répondre à une question pendant l’examen. Certains l’appellent « entraide » ou encore « copinage », en langage de loi, ceci est de la triche.
Un questionnaire a été distribué il y a près de 4 mois auprès des jeunes marocains pour sonder leur perception de ce phénomène social dont les dimensions ont probablement surpassé les murs de l’école pour s’étendre à plusieurs aspects de la vie. L’échantillon qui a participé au sondage comprend un peu plus de 500 personnes, recouvrant la communauté des ingénieurs, des écoles de commerce, de la Faculté des Sciences et la Faculté des Lettres de Rabat, ainsi qu’une partie aléatoire sur le net.
Bien que mitigées, les réponses des participants soulèvent des surprises interpellantes. En effet, alors que plus de 70% des répondants ont affirmé être parmi les meilleurs de leurs classes (le top tiers), seulement 12% d’entre eux déclarent n’avoir jamais triché au cours de leur scolarité. Pour le reste, 50% ont triché au moins 10 fois, et près de 30% ont commis cette fraude plus de 20 fois ! Aucune différence significative n’a été perçue relativement au sexe des participants dont 43% de femmes et 57% d’hommes. Cependant, il est intriguant de remarquer que parmi les 70% des participants qui ont admis que ce comportement est qualifié de « triche et qu’il ne doit pas être permis », plus du cinquième (22%) ont triché au moins 20 fois durant leurs études ! En parallèle, 47% des participants de moins de 20 ans – c’est dire les représentants de la génération montante – pensent que le fait de copier pendant l’examen est un « Comportement très normal, [et qu’]on s’entraide entre amis, surtout pendant l’examen » ou que ce comportement ne devrait même pas être qualifié de triche, mais qu’il est plutôt quelque chose qui ressemble à des transactions commerciales (du donnant-donnant). En contraste, une écrasante majorité, perçoit une personne qui refuse de « collaborer » pendant l’examen comme étant une personne honnête et raisonnable.
Quelle que soit l’option dans laquelle on s’inscrit en tout cas, on ne peut aucunement en être fier. Il est effectivement vrai que la triche n’est pas convenablement punie par notre système d’enseignement. Il est même encore plus vrai que certains professeurs et établissements en entier y prennent part. Mais le plus grave est de permettre à ce comportement de s’infiltrer doucement dans notre quotidien, d’abord dans un test à l’école, ensuite à l’examen national de baccalauréat, puis dans ce papier administratif peu important, et de là vers les déclarations frauduleuses d’impôts, à la comptabilité de l’entreprise…etc. Il est peut être trop hasardeux, voire incorrect, de généraliser, mais une analyse des conséquences sociales et économiques d’un tel phénomène fait vibrer la sonnette d’alarme.
J’aimerais signaler, à la fin, que l’objectif de cette enquête est purement scientifique, et qu’il devrait éventuellement aider à soulever des questionnements sur une problématique pesante sur le système d’enseignement au Maroc, pour permettre ultimement de proposer des solutions inhérentes à la réforme de ce système ; en effet, la réforme ne concerne pas uniquement les murs, les bureaux, et l’infrastructure matérielle en général, mais d’abord, et avant tout, le capital humain.
4 comments:
Le problème du copiage est récurent depuis des décennies et il est bien installé dans les habitudes de nos élèves, encouragé par les enseignants, ignoré l'administration des établissements et des parents et accepté par les parents!
Le pire c'est que la triche se répercute après sur sa façon de rendre service quand il serra responsable... Toute une histoire de mentalité qu'il faut changer.
Au sujet de la triche, j’aimerai apporter quelques réflexions pour toute fin utile. Je précise d’abord que mon intervention concerne plutôt les enfants du primaire. Ces enfants dont le développement n’est pas encore brassé ni malmené par la pensée formelle (pensée formelle c’est lorsque l’individu commence à penser et à se poser des questions sur comment il pense). Cette étape correspond en général à l’adolescence qui détermine souvent l’évolution de l’enfant en question.
De nombreuses études en science de l’éducation montrent que l’enfant arrive à l’école avec des représentations aussi diverses qu’extraordinaires. L’éducateur/ instituteur/maître/ professeur devrais dépister ces représentations avant d’entamer l’apprentissage proprement dit. C’est pour cela d’ailleurs qu’il est recommandé aux enseignants de poser toutes les questions possibles relatives au sujet du cours. Ce questionnement leur permettrait d’aller chercher tout le monde dans la classe.
En faisant une analyse réfléchie et objective, l’enseignant constatera que tous les élèves ont une vérité dans leur réponses. Il reste alors à mettre ces réponses et donc ces élèves en confrontation (provoquer un conflit cognitif). C’est le principe du courant constructiviste et je pense personnellement que les enseignants qui adoptent cette méthode arriveront surement à tuer l’idée de la triche avant même qu’elle germe dans la tête de l’élève.
On ne demande pas à l’élève de nous donner une réponse /vérité absolue, unique et précise mais on le pousse à construire des vérités et des solutions.
Mais avant de parler de triche, ne serait-il pas logique de parler d’examen? Rien qu’en évoquant ce mot, des milliers de personne de ma génération sursauteraient. Un sentiment de peur de trac d’angoisse … une fébrilité électrique a toujours raisonné toujours avec ce mot …un obstacle mural qui a probablement fracassé bien des têtes.
AL IMTIHANE (l’examen) a souvent été un concept cauchemardesque. Je me demande même s’il avait affecté d’une façon ou d’une autre notre mémoire collective.
J’espère que dans mon pays cette notion monstre d’examen commence à flétrir ou au moins prendre un aspect plus constructeur que destructeur. Les méthodes d’évaluation ont pris une grande place dans les sciences de l’éducation pour justement aller contrer cette déviation du développement vers un individu destructeur.
Pour conclure, n’est-il pas opportun de se demander pourquoi plusieurs écoles de renommé mondiale avaient depuis longtemps instauré des examens à documents permis et des questions à plusieurs réponses?
Le but ultime de cette modeste contribution est de se pencher sur les causes et non les conséquences de la «triche»
...Tres bien reflechi... pour le moins dire-
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